Couvre-feu avancé à 18h, date de réouverture des lieux culturels repoussée, reconfinement évoqué. Après les dernières annonces du gouvernement, comment les salles de spectacles survivent-elles ? Réponse avec plusieurs gérant.e.s de théâtres pour savoir comment ils.elles s’organisent.
Depuis le 30 octobre minuit, les lieux culturels sont fermés. Une date de réouverture début janvier 2021 avait été envisagée en automne dernier. Mais suite aux annonces émises par le Premier Ministre Jean Castex il y a quelques semaines, l’avenir reste flou quant à une possible reprise des spectacles au théâtre.
Lorsque le second confinement a été décrété, Perrine et Mélissa, gérantes de La Petite Loge à Paris, ont accueilli les nouvelles « avec déception mais résignation. Nous avons aussi plus d'espoir car nous avons vu qu’après le premier confinement, le public est revenu en nombre à la réouverture ».
Toute une organisation à revoir
Les annonces changent quotidiennement, obligeant les gérant.e.s des salles à s’adapter comme ils.elles peuvent : télétravail recommandé, les salarié.e.s s’organisent à distance : « Normalement, on est tous les quatre dans le même bureau donc l’information circule très vite, décrit Céline Abrahamian, responsable de la communication, des relations public/presse et de la billetterie depuis 2006 à l’Espace Gerson, un café-théâtre à Lyon. On apprend à travailler à distance mais c’est très bizarre. Les informations changent tous les jours alors ce n’est pas évident. Comme on est une petite équipe, on peut être davantage réactifs ».
Des aides financières mises à disposition
Pour pallier ces dommages, des aides ont été mises à disposition pour les lieux culturels : « Peu importe la taille de la salle, explique Dan Bolender, co-créateur du Théâtre BO Saint-Martin à Paris, on bénéficie tous des mêmes aides de la part du gouvernement via le Ministère de la Culture et le Ministère des Finances ».
« Je passe mon temps à faire des dossiers d’aide auprès des Institutions, complète-t-il. Ces dossiers sont importants pour obtenir un soutien. On peut bénéficier aussi de l’activité partielle pour nos employés ».
Spectacles reportés, dates annulées
Toutes les salles de spectacles s’arrangent au maximum pour reporter les représentations pendant cette période : « Nous adaptons les billetteries au fur et à mesure des annonces officielles », soulignent Perrine et Mélissa. Quant à Céline Abrahamian, l’Espace Gerson a déjà reporté 200 représentations environ, ce qui représente une perte de chiffre d’affaires de 80%. « C’est un chiffre énorme, constate-t-elle, mais on garde le sourire et de l'espoir ».
« Le fait d’organiser notre programmation sur une courte durée et de ne pas l’anticiper à l’avance nous laisse pas mal de possibilités pour trouver de nouveaux créneaux, ajoute Céline Abrahamian. Pour le moment, on a pu reporter quasiment tous les spectacles, sauf deux ou trois. Toutes les réservations sont modifiables et quand ce n’est pas possible de reporter, on propose un avoir pour un autre spectacle ».
Les réseaux sociaux : une alternative qui s'essouffle
En attendant, les lieux culturels tentent comme ils peuvent de rester en contact avec leur public via les réseaux sociaux. Chacun essaie de publier des messages d’espoir sur une réouverture prochaine : « On diffuse des photos du lieu avec des cœurs, en disant qu'on se retrouvera bientôt, explique Céline Abrahamian. On a la chance de travailler dans un lieu aimé du public et qui bénéficie d’une certaine notoriété. Alors quand on publie une photo de l’Espace Gerson, les gens sont touchés. On propose aussi des modules vidéos en montrant comment le lieu était avant ou ce qui va être programmé prochainement ».
Reste un souci de taille : aucun nouveau contenu ne peut être posté. « En temps normal, on alimente les réseaux sociaux avec les applauses à la fin des spectacles ou une photo de l’artiste dans les loges par exemple, poursuit Céline Abrahamian. Mais en ce moment, le lieu est fermé, il n’y a personne. On pourrait alimenter les réseaux avec des archives, mais je pense qu’on a besoin de renouveau ».
Quant à Dan Bolender, faire des lives ne lui semble pas être une bonne idée pour l’instant : « Ce serait une bonne idée si la salle était ouverte, affirme-t-il. Il faut que les artistes aient du monde face à eux. C’est du spectacle vivant, il y a une ambiance qu’on ne peut pas retranscrire en vidéo ».
Un avenir incertain qui pèse aussi pour les artistes
Privés de leur lieu de travail, les artistes échangent régulièrement avec les gérant.e.s des salles de spectacles. « Nous sommes en contact avec les humoristes pour les informer et les soutenir au maximum », confient Perrine et Mélissa. « Les artistes ont tous envie de reprendre la scène, souligne Dan Bolender. C’était très compliqué pour eux d’arrêter après la reprise ».
Humoristes, comédien.ne.s et stand-uppeur.euse.s continuent d’ailleurs d’écrire leur prochain set : « Les artistes ont beaucoup de choses à dire en ce moment, évoque Céline Abrahamian. Quand les salles vont rouvrir, je pense qu’on va assister à la naissance de spectacles qui s’inspirent de cette période. On le voit déjà un peu sur les réseaux sociaux ou sur YouTube. Même s’ils peuvent continuer à répéter, ce qu’ils veulent, c’est retrouver la scène. Vivement que ça reprenne ! ».
Des dispositifs déjà mis en place pour la suite
Personne ne peut avancer une date pour un retour des spectacles, même si les gérant.e.s ont déjà tout prévu. Dans l’attente d’un éventuel passeport vaccinal ou de l’emploi de QR codes pour identifier les spectateur.rice.s, la réouverture se ferait avec des règles sanitaires déjà appliquées lors du premier déconfinement dans les lieux culturels. Au programme : prise de température, emploi du gel hydroalcoolique, port du masque et limitation du nombre de places pour respecter la distanciation sociale.
Que ce soit les spectateur.rice.s, les artistes ou les gérant.e.s des salles de spectacles, tout le monde espère avec impatience que ces lieux culturels ouvriront très prochainement : « Nous envisageons la réouverture avec toujours un certain nombre de gestes barrières à respecter qui créent malgré tout une ambiance un peu différente. Mais nous avons hâte ! » concluent Perrine et Mélissa.
Pour suivre l’actualité de ces trois salles de spectacles, rendez-vous sur leur site officiel : La Petite Loge, L’Espace Gerson et Le Théâtre BO Saint-Martin.
© Photo de couverture : site officiel La Petite Loge