TOP
Redouanne Harjane - DR

Rencontre avec Redouanne Harjane, humoriste de rue à l’heure du couvre-feu

Alors qu’aucune date n’est prévue pour la réouverture des salles de spectacles, l’humoriste Redouanne Harjane a pris les devants et mis à profit son temps libre pour lancer de nouveaux projets. Tout d’abord, avec son street stand-up, un format vidéo qu’il publie tous les mercredis sur ses réseaux sociaux où il se filme en train de faire des vannes dans la rue. Il a également sorti des clips de chansons qu’il vient tout juste d’enregistrer. Rencontre avec un artiste qui ne veut pas s’avouer vaincu.

Comment se passe votre vie depuis le 31 octobre ?

Vous parlez bien du 31 octobre 2020 ? Je viens du futur donc je dois savoir. C’est tellement bizarre depuis un an que je pourrai difficilement dire depuis quand c’est bizarre. Faudrait plutôt me demander comment se passait ma vie d’avant ?

Alors, comment était votre vie avant ?

C’était déjà compliqué mais là ça l’est encore plus. On constate que le monde change et un métier comme monter sur scène pour faire des blagues avec un micro est devenu impossible à pratiquer. On est obligé de le digitaliser vu que le public ne peut plus se déplacer. Tu te rends compte aussi que si tu n’as pas mis d’argent de côté ou que tu es intermittent, t’es mort. Je galère comme tout le monde. Après, il ne faut pas oublier que la France donne des aides ce qui n’est pas le cas dans plein d’autres pays. Reste que les gens ne sont pas bien, le nombre de dépressions augmente, c’est chaud.

Je viens du théâtre de rue

Vous avez produit des choses pendant ce laps de temps. Vous avez déjà sorti des vidéos de street stand-up. Comment cette idée vous était-elle venue ?

Je viens du théâtre de rue. J’en faisais dans les rues de Metz il y a plus de 20 ans. Je faisais de la musique avec un pote sur un ton humoristique. Bon après je me suis « embourgeoisé » vu que j’ai commencé à jouer dans des salles. Cette période m’a obligé à me bouger et à tenter des choses. 

On écrit tout avant, il n’y a pas d’improvisation

L’idée de base, c’est d’aller jouer pour les gens. Vu qu’on a des contraintes de sortie, je voulais que la personne qui passe dans la rue puisse me voir pendant qu’elle va s’acheter son sandwich ou prendre le métro. Un épisode fait 1 minute 30 mais à chaque fois on tourne deux heures de rush.

Episode 4 de Street stand Up

Quel est le message derrière cela ?

Le message c’est de montrer que même si les théâtres sont fermés, nous ne sommes pas morts. On fait un métier qu’on ne peut même plus exercer. Ce qui est le cas également des musiciens vu qu’ils sont aussi non essentiels. Jouer dans la rue c’est sympathique quand tu es en Avignon et qu’il fait beau.  Le plus tragique, ce n’est pas le fait qu’il n’y a plus de revenus liés à l’artistique mais qu’on ne puisse plus s’épanouir dans notre métier.

Comment préparez-vous ces vidéos ?

On écrit tout avant, il n’y a pas d’improvisation. On choisit aussi les spots avant. D’ailleurs, je reçois des messages de gens qui me demandent où je serai la prochaine fois. Un peu en mode public pirate. Donc pourquoi pas monter un truc comme cela. L’objectif est d’instaurer un rendez-vous tous les mercredis.

En plus de votre « street stand-up », vous avez sorti de nouvelles chansons, avec un côté drôle et mélancolique comme à votre habitude…

Booba disait que les artistes sont de grands sensibles. Je me considère comme hypersensible au-delà de mon univers. Par exemple, j’ai choisi de tourner mon dernier clip dans un hospice pour rappeler que même ces établissements sont abandonnés. J’ai enregistré ces chansons dans mon propre studio de musique. 

On choisit les spots avant. D’ailleurs, je reçois des messages de gens qui me demandent où je serai la prochaine fois, un peu en mode public pirate

En plus du théâtre, j’ai une formation musicale. J’ai fait l’école de Jazz à Nancy. C’est pour cela que j’ai toujours voulu mêler musique et humour. En France, cela se faisait pas mal avant. J’aimerais développer des projets musicaux qui mélangent la pop et le rap avec un aspect comique. Une chanson drôle, tu l’écoutes sur scène ou en live. J’aimerais trouver la chanson que tu peux écouter chez toi en étant drôle et profond à la fois. Le but serait de faire des chansons comme je peux les entendre.

Le clip de Zbeul, la chanson de Redouanne Harjane

Vous avez aussi lancé une marque de vêtements ?`

C’est un projet que j’ai lancé il y a quelques temps. L’objectif est de proposer du merchandising pour mes spectacles. La marque c’est RH avec des citations extraites des spectacles. Je commence à avoir des commandes donc cela commence à prendre.

Comment occupez-vous votre temps libre ?

Je lis beaucoup. J’en ai notamment profité pour lire la Biographie de Marc Aurèle écrite par Benoît Rossignol. J’ai lu le dernier Prix Goncourt, L’anomalie de Hervé Le Tellier, que je trouve très intriguant. Je regarde des films qui ont mon âge comme Missisipi Burning qui est sur Amazon et que je vous recommande. Il y a aussi la série Gangs of London, très lourd !

Retrouvez toute son actualité sur son compte Insta et Facebook

Vous pouvez également (re)voir ses street stand up et (ré)écouter ses musiques en vous rendant sur sa chaîne YouTube

©Redouanne Harjane – DR